Les Congolais auront attendu bien longtemps. Joseph Kabila a enfin nommé son premier ministre. En la personne de Bruno Tshibala, nommé ce vendredi dans la soirée par décret présidentiel, le président Joseph Kabila semble trouver en lui le profil qu'il recherchait.

« Le président a le pouvoir discrétionnaire. N'est-ce pas de dire parmi tels et telles, pour telle raison je prends celui-ci ? Et sans entrer dans les détails, je dis qu'en gros M. Tshibala répond au profil. Le président de la République a estimé que M. Tshibala était la personne la mieux indiquée pour l'accompagner dans le processus de normalisation de notre cycle électoral jusqu'aux élections », a déclaré André-Alain Atundu Liongo, porte-parole de la majorité politique.

Le communicateur répond ainsi aux diverses interrogations sur la nomination de Bruno Tshibala dans le pays. Plusieurs journaux déjà depuis ce matin se sont demandés pourquoi le président Kabila a choisi Bruno Tshibala, un dissident de l'Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS) ou encore s'il s'agit bien de l'homme de la situation. La question est pertinente, vu le passé récent de  l'homme politique.

Ancien secrétaire général adjoint et porte-parole de l'UDPS, Bruno Tshibala, ce juriste sexagénaire était un membre très influent du principal parti de l'opposition. Selon ces propres termes, il aurait fait 36 ans de lutte aux côtés de l'opposant historique feu Etienne Tshisekedi. Entre temps, ce fils du Kasaï s'est désolidarisé du parti et a dénoncé une restructuration du Rassemblement des forces acquises au changement (la plus grande plateforme de l'opposition) et a rejoint le mouvement des dissidents de cette rassemblement. Pour beaucoup, son revirement aurait un rapport avec une discussion nocturne secrète qu'il a eue avec le directeur de cabinet de Jospeh Kabila l'année dernière lors qu'il était encore détenu à la prison centrale de Makala. Rapidement il a été exclu du parti. Sa nomination est donc le fruit des discussions entre le pouvoir Kabila et une portion plutôt minoritaire de l'opposition.

Bruno Tshibala, l'homme de la paix et la cohésion ?

Bien malin qui pourra le dire ! « la personne la plus compatible pour consolider la cohésion nationale d'abord, et ensuite la cohésion de la classe politique autour du leadership du chef de l'Etat », dit très convaincu André-Alain Atundu Liongo. Des commentaires qui sans convaincre, sont rapidement contredits par la majorité de l'opposition.

Dans le Rassemblement des forces acquises au changement, on déclare déjà que la nomination de Bruno Tshibala est un non-évènement par lequel on ne se sent pas concerné. Selon le rassemblement, cet acte n'apporte ''aucun signe de décrispation''.

« Cette nomination, si mérite il y a, elle a deux mérites. Le premier c'est de prouver que ce qu'on appelle dissidence du Rassemblement a été le produit de la majorité présidentielle qui le reconnait aujourd'hui. Le deuxième mérite c'est d'apporter la preuve la plus éclatante de ce que le président Kabila n'attend point exécuter l'accord du 31 décembre 2016 », a affirmé Christophe Lutundula, l'un des délégués du Rassemblement à RFI.

La plateforme a appelé à une manifestation ce lundi qu'elle maintient fortement.
Chassé de son ancienne maison, accueilli comme premier ministre alors qu'il n'est encore qu'un traître dans l'esprit de plusieurs Congolais, Bruno Tshibala aura une tâche très difficile.