Afrique du Sud : Zuma va au clash avec l'ANC en éjectant Gordhan du gouvernement

Le président sud-africain, Jacob Zuma a littéralement « fait le ménage » dans son équipe gouvernementale en décidant un remaniement dans la nuit du 30 au 31 mars. Une décision qui a signifié l’éviction de Pravin Gordhan, symbole de l’opposition interne au leader de l’ANC et qui a décidé de se ranger du côté des banques et des établissements financiers lors de l’affaire des clôtures des comptes bancaires liés au clan Gupta. Un remaniement qui risque de cristalliser les tensions entre les différents courants qui s’écharpent au sein d’un parti de l’ANC mis K.O par les scandales à répétition et la débâcle électorale d’août dernier.
Amine Ater

L'Afrique du Sud semble se diriger vers une nouvelle crise politique. En effet, le président Jacob Zuma vient d'opérer un remaniement radical de son gouvernement qui risque d'aggraver les divisions internes qui gangrènent l'ANC. Un jeu de chaises musicales qui a débouché sur l'éviction de Pravin Gordhan du Ministère des Finances. Une personnalité forte de l'ANC que ces soutiens considéraient comme le « garant du Trésor » et qui s'était opposé frontalement à Zuma, lors des crises engendrées par le rapport prouvant les liens « incestueux » entre le président sud-africain et la richissime famille Gupta.

Le fidèle Gigaba pour remplacer Gordhan

Un remplacement qui a été rendu public par la présidence dans la nuit du 30 au 31 mars et qui mentionne la nomination de Malusi Gigaba, fidèle parmi les fidèles de Zuma et qui occupait jusqu'au 30 mars le poste de ministre de l'Intérieur. Ce dernier sera épaulé par Sfiso Buthelezi, un parlementaire de l'ANC, qui a faisait partie des détenus politiques du parti lors de l'apartheid. Ce remaniement a d'ores et déjà occasionné des sueurs froides du côté de la capitale économique, Johannesburg, où Gordhan comptait de nombreux soutiens

Ce partisan d'une réduction des dépenses publiques et d'une certaine dérégulation avait réussi à charmer les principaux groupes de la place de Johannesburg. Une proximité qui n'était pas du goût du clan Zuma en guerre ouverte avec les principales banques et établissement financiers, alors que 3 des 6 membres historiques de l'ANC et le parti communiste sud-africain (allié historique du parti) ont tôt fait de s'opposer à ce remaniement. Une décision qui cristallise encore plus les divergences entre pro et anti-Zuma, les seconds accusant le président et chef du parti d'avoir rompu le pacte de confiance entre l'ANC et la base électorale.

L'administration Zuma a rappelons-le, défrayé la chronique lors des 2 dernières années en enchaînant les scandales de corruption et de collusion avec certains milieux des affaires. Le président a également été jugé responsable de la pire défaite jamais enregistrée par l'ANC depuis la fin de l'apartheid, lors des élections municipales d'août dernier. Cette éviction du désormais ex-ministre des Finances vise essentiellement à conserver des ministres « fidèles » » au président et lui permettre de terminer son mandat sans à avoir à se soucier d'un « putsch gouvernementale ».

Une éviction différée à cause de la mort de Khatrada

Attendu depuis le « clash » frontal entre Zuma et Gordhan sur l'affaire des fermetures des comptes bancaires liés à la famille Gupta, cette éviction a été retardée par le décès d'Ahmed Khatrada (compagnon de Mandela et figure iconique de l'ANC), survenu le 29 mars dernier. Enterré en grande pompe, mais en l'absence de Zuma, Persona non grata pour les proches de Khatrada qui avait adressé une lettre publique appelant le président à démissionner en mars 2016. Zuma aura ainsi attendu 48 heures pour mettre à exécution son remaniement.

Cette décision met également fin à une relation orageuse entre la présidence et le ministère des Finances qui se sont affrontés dès la nomination de ce dernier en 2015, sur la question du financement des centrales nucléaires souhaitées par Pretoria et sur la gestion des entreprises publiques. Remplacer Gordhan par le fidèle Gigaba rentre également dans le cadre de la lutte interne qui secoue l'ANC pour la succession de Zuma à la tête du parti dont les élections internes sont prévues pour décembre prochain.

Le remaniement ministériel a également impacté le rand qui a accusé une baisse de 2,6% par rapport au dollar américain. Une situation qui exacerbe l'inquiétude des cercles d'affaires de Durban et Johannesburg qui craignent une instabilité politique alors que l'économie sud-africaine se remet à peine des contrecoups de la crise financière mondiale, de la volatilité des courts des minerais ou encore des malversations ayant touché les cours du rand. Des craintes renforcées par l'annulation d'une série de rencontres programmées avec des investisseurs britanniques et américains.

La présidence a également nommé Mmamoloko Kubayi au ministère de l'Energie à la place de Tina Joemat-Petterson  Là où Joe Maswanganvi récupère le portefeuille des Transports à la place de Dipuo Peters. Le ministère du Tourisme fait également partie des portefeuilles ayant connu du changement où Tokozile Xasa a été remplacé par Derek Hanekom. Le remaniement concerne également les portefeuilles de la police, des travaux publics, de la communication, de la fonction publique ou encore de l'intérieur.

Amine Ater

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.