WEF : à Durban, l’Afrique se cherche une place dans le nouveau contexte mondial

Du 3 au 5 mais, le World Economic Forum (WEF) tient son focus africain à Durban en Afrique du Sud. L’occasion de faire le point sur l’état du continent ainsi que les perspectives en matière de développement. Des sujets qui constituent le plat de résistance au menu des décideurs et investisseurs de tous bords.
Cette 27e édition du Forum économique mondial se tient sous le thème de la «croissance inclusive à travers un leadership responsable».

Comme c'est le cas assez souvent ces derniers temps lorsqu'il s'agit de parler de l'Afrique, les discours, les analyses ou les pronostics pour les scénarii du futur ont tous un air de déjà entendu. L'Afrique a du potentiel et le continent représente l'avenir du monde ! Le sujet semble presque trop consommé en dépit de l'alternance des intervenants et des thématiques qui n'ont le mérite de rivaliser en rhétorique. De manière générale d'ailleurs, l'opinion africaine ne s'en préoccupe que peu, parce que justement les fruits de cette embellie qui semble faire consensus auprès des analystes de tout genre, tarde à se faire sentir dans leur vécu quotidien.

C'est à donc à un autre remake de ces évènements qui ne cessent de se multiplier sur le continent qu'on aurait dû s'attendre à l'occasion des travaux de l'édition 2017 du Word Economic Forum (WEF) sur l'Afrique. Cette année, c'est à Durban en Afrique du Sud que se tient la rencontre, qualifiée de «Davos africain» et à laquelle participent une dizaine de chefs d'Etat, des ministres, chefs d'entreprises, investisseurs, ainsi qu'une panoplie de spécialistes des questions de développement et autres célébrités mondiales du monde des affaires, mais aussi de la culture.

Pour cette 27e édition, le thème choisi a été consacré aux défix d'«une croissance inclusive à travers un leadership responsable». C'est en effet aux  chefs d'Etats et autres décideurs politiques que revient la lourde charge de créer les conditions d'un véritable développement du continent, à travers la mise en oeuvre de mesures concrètes et surtout la prise en compte des intérêts de leurs concitoyens. A travers des interventions, des tables rondes ainsi que des réunions thématiques, les participants ont analysé les perspectives de développement du continent à l'aune des différentes mutations sociopolitiques, économiques et surtout industrielles à l'échelle planétaire. «On parle aujourd'hui de la 4e révolution industrielle. Ce qui suppose en d'autres termes que notre façon de penser doit changer», a expliqué le président sud-africain lors du discours inaugural de l'évènement.

« L'Afrique est dans une position où elle peut rêver, dans la mesure où c'est une région en développement, comparée à d'autres endroits du monde». Jacob Zuma

Le chef d'Etat de la première économie du continent s'est félicité de la présence massive de personnalités qui interviennent dans le développement de l'Afrique et pour lui, «cette participation inédite est un signe que le monde suit le développement de nos pays».

Inégalités sociales et développement

Du potentiel, le continent en regorge comme cela à été longuement ressassé tout au long des débats et des rencontres. Les perspectives restent toutefois confrontées à d'innombrables défis qui plombent le développement du continent. Alors que jusque-là, c'est l'ampleur de la pauvreté des populations africaines qui semblait constituer l'un des défis majeurs pour les différents Etats, cette fois, les avis convergent plutôt sur la persistance des inégalités sociales. Ce qui semble logique si l'on se réfère à la dynamique de croissance que connait l'Afrique depuis les années 2000, sans pour autant qu'elle se répercute sur les conditions de vie des populations.

«Nous n'avons pas encore trouvé de solutions adéquates pour réduire le fossé entre les riches et les pauvres et ainsi assurer une croissance inclusive significative», a concédé le chef d'Etat sud-africain. D'après Jacob Zuma, «le fossé entre les pays développés et les pays en développement demeure immense, tout comme celui entre les riches et les pauvres dans de nombreux pays».

Les enjeux pour le continent sont donc assez stratégiques, surtout que malgré les efforts et les progrès enregistrés ces dernières années sur le continent, l'Afrique compte encore de nombreux pays fragiles. A ce sujet, c'est le président zimbabwéen qui a fait sensation en remettant en cause cette perception, étayée pourtant par plusieurs études et rapports publiés par des cabinets internationaux en marge de l'évènement. S'appuyant sur le cas de son pays, l'inénarrable Robert Mugabé a, non sans ironie, affirmé que son pays connaît une dynamique sans précédent et qui fait du Zimbabwe, «le pays le plus développé du continent, derrière l'Afrique du Sud».

Un plan Marshall pour l'Afrique

Le décor ainsi planté et les multiples enjeux rappelés, les pistes de solutions étaient également à l'ordre du jour. Le plus grand défi pour le continent, c'est de gagner en compétitivité pour attirer et mobiliser plus de financements, afin de pouvoir mettre en œuvre différents programmes de développement lancés par plusieurs pays. «Nos économies sont encore fragiles et l'Afrique doit aussi pouvoir bénéficier de ressources de longue durée, comme d'autres régions du monde en ont profité», a plaidé le président sénégalais Macky Sall. L'invité spécial de cette 27e édition du WEF sur l'Afrique a profité de sa participation au panel consacré aux infrastructures énergétiques, ainsi qu'à celui sur le partenariat entre les pays industrialisés du G20 et l'Afrique, pour faire la promotion du Plan pour un Sénégal Émergent (PSE).

«L'Afrique peut contribuer de façon décisive à la formation du PIB mondial grâce à son important potentiel économique.  Il faut la volonté de grands pays, comme c'est le cas aujourd'hui des membres du G20, pour lever les financements qui permettent à nos pays d'accéder à des ressources sur le long terme. Donc on se réjouit de voir l'Allemagne, pendant sa présidence du G20, bâtir un «compact avec l'Afrique» pour établir une relation afin de financer notre développement». Macky Sall

Le chef d'Etat sénégalais n'a pas manqué de reconnaître que les gouvernements doivent veiller à engager plus de réformes structurelles afin de gagner en attractivité, mais aussi renforcer les efforts pour mobiliser les ressources internes et lutter contre la fuite des capitaux. Pour Macky Sall, ce sont des conditions pour une meilleure mobilisation des ressources nécessaires à la mise en œuvre des stratégies élaborées par les différentes autorités politiques et qui permettront de relever le défi de l'emploi des jeunes et du déficit des infrastructures en Afrique.

Emploi et infrastructures

Parmi les sujets qui ont été assez récurrents durant les assises, ceux de l'emploi des jeunes et des infrastructures. Avec les perspectives de croissance de la population africaine attendue dans les prochaines années, le défi va s'amplifier davantage et poser un réel problème aux Etats africains, comme c'est déjà le cas dans certains pays aujourd'hui. La nécessité pour le continent de résorber son déficit en matière d'infrastructures ouvre en ce sens de nouvelles fenêtres d'opportunités pour les pays africains, pour faire d'une pierre deux coups : relever les défis de la croissance inclusive et de l'emploi.

En plus des financements nécessaires, la contribution du secteur privé a été jugée à ce niveau comme déterminante. Le banquier et philanthrope nigérian, Tony Elumelu, a ainsi abondé dans ce sens, insistant particulièrement sur le rôle que peuvent jouer les PME/PMI dans l'accélération de la croissance africaine et la création de l'emploi.

Un avis partagé par le célèbre acteur hollywoodien Forest Whitaker qui a mis en avant le dynamisme des jeunes africains comme un levier de développement, à condition d'en saisir les opportunités.

Autant de remèdes pour une nouvelle Afrique qui continue à chercher sa place dans un mode en perpétuel mouvement et qui laisse les moins préparés à la marge. Les challenges ont été en tout cas remis à l'ordre du jour et comme au WEF, les représentants de la société civile se sont fait également entendre à Durban à travers des manifestations symboliques organisées en marge de l'événement, au même titre que d'autres  rencontres qui ont mis sous les feux des projecteurs de jeunes talents africains.

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