Le Burundi, premier Etat au monde à quitter la CPI

Nouveau claquage de porte à La Haye aux Pays-Bas dans la fronde africaine contre la Cour pénale internationale (CPI). En véritable crise de crédibilité et de légitimité sur un continent où elle est accusée d’acharnement anti-africain, l’institution de Fatou Bensouda vient de perdre un de ses 122 pays-membres. Le Burundi de Pierre Nkurunziza qui avait entamé sa procédure de retrait un an plus tôt vient d’acter son départ. Il est le premier Etat en Afrique et dans le monde à aller jusqu’au bout de son retrait.
Ibrahima Bayo Jr.
A gauche, président du Burundi Pierre Nkurunziza. A droite, Fatou Bensouda, procureure générale de la Cour pénale internationale.

La Gambie a fait machine arrière in extremis à la faveur d'un changement de régime. La Zambie a été contrainte de renoncer à son retrait après une consultation populaire négative. Mais le Burundi allègrement franchi le pas en  claquant la porte de la Cour pénale internationale (CPI) au nez de Fatou Bensouda, sa procureure.

Retrait entamé sur les traces de la fronde africaine contre la CPI

Mi-octobre 2016, dans les pas de l'Afrique du Sud qui annonçait son retrait de la cour, le parlement burundais avait voté en procédure accéléré, une loi pour se retirer du Statut de Rome, le texte fondateur de la Cour pénale internationale. Selon la procédure de retrait, il s'en est suivi l'envoi d'une lettre au secrétaire général des Nations Unies pour lui spécifier le retrait. Un an plus tard, en l'absence d'une annulation de la procédure, le retrait est acté.

Dans un continent où l'institution judiciaire basée à La Haye aux Pays-Bas n'est plus en odeur de sainteté, le Burundi devient le premier Etat d'Afrique et du monde à claquer la porte de la cour. Et pourtant, l'on pourrait penser que le retrait du Burundi s'inscrit dans cette dissidence africaine contre la juridiction de Fatou Bensouda.

Bujumbura pourrait effectivement puiser ses arguments dans cet acharnement contre les Africains dénoncé par plusieurs Etats du Continent et qui avait même motivé un projet de résolution à l'Union africaine pour un retrait de tous les pays africains. La décision de Bujumbura pourrait trouver de l'eau au moulin de la décrédibilisation de l'institution par les turpitudes de son ancien procureur, l'Argentin Luis Moreno Ocampo dont ses poursuites sans fondement juridique contre Laurent Gbagbo, l'ancien président ivoirien.Et pourtant des motifs plus sibyllins motivent le retrait du Burundi.

Motifs sous-jacents d'un retrait

Sous le coup d'une enquête de Fatou Bensouda pour des crimes supposés commis lors de la crise post-électorale qui a suivi sa réélection à un troisième mandat, en déliquescence avec l'Union européenne sur la question des droits de l'Homme, Pierre Nkurunziza avait enclenché la procédure de retrait alors que l'ONU dénonçait une répression proche d'un « risque de génocide ».

Aujourd'hui, à 53 ans -dont 12 au pouvoir-, le président burundais s'apprête à soumettre à un référendum en 2018, une réforme constitutionnelle pour faire sauter le verrou de la limite de mandat. Cette dernière devrait lui permettre de se présenter à nouveau en 2020  pour un mandat de cinq ans. Puis via un changement de durée, d'être théoriquement candidat à nouveau en 2027.

Face à une communauté internationale qui pousse des cris d'orfraie devant ce qu'elle dénonce comme une « dérive autoritaire » du pouvoir qui s'exerce depuis les collines de la capitale, Bujumbura fait un pied de nez à la justice internationale. Au-delà, Pierre Nkurunziza ouvre devant elle, le parapluie antiatomique de ce retrait face aux poursuites éventuelles de la CPI. Curieuse manière d'échapper à la justice!

Ibrahima Bayo Jr.

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Commentaire 1
à écrit le 27/10/2017 à 21:58
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Il ne s'agit pas d'une justice mais d'un instrument de machination en vue de perpétuer la domination et le pillage de l'Afrique. Le cas Moreno n'est pas un dysfonctionnement, c'est la nature originelle de ce machin.

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