Togo : un semblant d'accalmie, en attendant les médiations

Après une semaine de manifestations, avec son lot de morts et de blessés, la vie reprend peu à peu son cours dans la capitale, Lomé. Un calme précaire qui n’a pas empêché la coalition de l’opposition de se préparer à de nouvelles manifestations contre le pouvoir, en attendant l’intervention de médiateurs dans cette crise politique au Togo. Reportage à Lomé.
Vendredi dernier, Lomé reprenait sa vie habituelle avec les commerces ouverts.

La journée de ce lundi 23 octobre 2017 à Lomé a démarré comme un jour ordinaire. Déjà au petit matin, les commerçants vaquaient à leurs occupations alors que les marchés ouvraient. Dans les bureaux, les activités ont démarré normalement et dans les quelques quartiers où nous sommes passés, aucune absence n'a été signalée, comme cela a été le cas la semaine dernière. D'ailleurs, très peu de personnes avaient évoqué les troubles comme la véritable raison expliquant leur absence.

Sur la route qui mène à son bureau à Bè-Kpota, Yves Tchagnawo ne peut s'empêcher de constater les restes des pneus brûlés sur la voie publique et les dégâts matériels des affrontements entre corps habillés couplés aux miliciens et les populations. «J'habite à Agoè dans le quartier Fiovi. J'ai quitté mon domicile autour de 6h15. Mais jusqu'alors je n'avais encore rien vu qui fasse peur. La semaine passée, je n'ai pas osé aller à mon travail les trois derniers jours. Aujourd'hui, outre la patrouille qui n'a pas vraiment quitté certains coins de la ville, je crois que tout va bien. Je suis arrivé au bureau sans me faire inquiéter. Je crois que pour le moment, la vie a repris», affirme-t-il.

Le calme de la capitale togolaise n'est que relatif par rapport à celui des autres villes qui ont connu les troubles et où les activités ont repris.

A Sokodé par exemple, ville où le climat était plus tendu, malgré le calme, les militaires n'ont pas quitté les rues. Malheureusement, comme le regrette Hamidou, un jeune enseignant du quartier Kouloundè, ceux qui sont partis vivre dans la brousse fuyant la répression ne sont toujours pas revenus dans la ville. «Le calme est revenu ? Les activités ont très timidement repris ce matin. Jusqu'à ce samedi, c'était même difficile d'aller ne serait-ce que pour acheter une carte de recharge. L'armée s'est retirée, mais avec la police et la gendarmerie un peu partout, nos frères qui ont fui ne sont pas de retour. Donc, le calme n'est qu'apparent. Si nos frères ne reviennent pas, comment pourrions-nous rester calmes ? Ça va être difficile», témoigne Hamidou depuis Sokodé.

Un calme précaire

Tout porte donc à conclure que le calme actuellement au Togo risque d'être précaire. Alors que les douleurs sont encore vives, les partis politiques regroupés au sein de la coalition des quatorze ne comptent donner aucun répit au président Faure Essozimna Gnassingbé. Ils viennent d'annoncer encore trois jours de marches les 7, 8 et 9 novembre prochain pour exiger «le retour à la constitution de 1992, la révision du cadre électoral, la libération immédiate et sans condition des personnes arrêtées depuis le 19 août 2017».

Avant ce mot d'ordre, la coalition de l'opposition prévoit une tournée à l'intérieur du pays pour, dit-on, témoigner sa compassion aux victimes des «exactions des militaires et des miliciens». Selon les sources de la coalition, cette tournée se fera en deux temps : du 28 au 30 octobre 2017 dans les régions centrale, de la Kara et des savanes et ensuite du 4 au 06 novembre 2017 dans les régions maritime et des plateaux

Les autorités ayant interdit les marches durant les jours ouvrés, beaucoup craignent déjà une escalade de la violence et espèrent d'ici là une réussite des médiations diverses annoncées.

Initiative portée par les présidents ivoirien, ghanéen ou encore béninois, la nouvelle de la médiation a provoqué une certaine émotion dans le pays. Le président Alassane Ouattara de la Côte d'Ivoire a recommandé au président togolais de libérer l'imam Djobo Alassani Mollar arrêté le lundi 16 octobre, d'arrêter la «répression aveugle» et d'ordonner un strict maintien de l'ordre. Aux partis de l'opposition, il a demandé en contrepartie de mettre fin aux marches et laisser Faure Gnassingbé terminer son mandat. Une proposition qui suggère un départ en 2020 du chef d'Etat togolais. Ce à quoi le parti au pouvoir ne semble pas prêt à se résoudre.

La conférence ministérielle de la Francophonie reportée

Le retour de calme à Lomé ne rassure pas non plus à international. Après le report sine die du sommet Israël-Afrique, c'est la conférence interministérielle de la Francophonie prévue initialement du 24 au 26 novembre 2017 qui vient d'être aussi reportée. «Le gouvernement togolais, après consultation avec les instances de l'Organisation internationale de la Francophonie, principalement la secrétaire générale, Son Excellence Madame Michaëlle Jean, et en vue de s'offrir tous les moyens nécessaires de mieux préparer cette rencontre internationale de haut niveau, informe que cette conférence ministérielle de la Francophonie ne pourra plus se tenir à Lomé du 24 au 26 novembre prochain comme initialement prévu», lit-on dans le communiqué du gouvernement togolais.

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