Zambie : un « oui » massif au maintien du pays dans la Cour pénale internationale

Les Zambiens ont définitivement tranché ! Trois mois après leur lancement, les résultats de la consultation nationale pour déterminer si le pays devait ou non quitter la Cour pénale internationale (CPI) ont enfin été révélés : la Zambie ne quittera pas la juridiction basée à La Haye aux Pays-Bas. C’est d’ailleurs la position que défendra Lusaka à l’Union africaine où certains pays brandissent la menace d’une motion de retrait collectif de la CPI.
Ibrahima Bayo Jr.
La Gambienne Fatou Bensouda, procureure générale de la Cour pénale internationale.

C'est un verdict sans appel qui devrait soulager Fatou Bensouda dont l'institution n'a plus la cote dans certains pays du continent ! Après une sorte de référendum national sans vote, les Zambiens ont décidé, à une écrasante majorité, le maintien de leur pays dans la Cour pénale internationale, la juridiction à compétence universelle pour juger des «crimes de guerre, crimes contre l'Humanité».

Un «oui» massif en faveur du maintien

Devant le parlement ce vendredi 30 juin, Given Lubinda, ministre zambien de la Justice, a présenté les résultats de l'enquête menée dans le pays du 27 mars au 30 mai 2017. Au terme de cette période de consultation nationale, 91% des 3 489 requêtes déposées défendaient le maintien de la Zambie au sein de la CPI. La majorité des répondants ont estimé que leur pays, en tant qu'Etat souverain, devait prendre seul la décision sans contrainte d'autres pays, selon le Garde des Sceaux.

Fin mars dernier, alors qu'un important mouvement de claquage de la porte de la juridiction internationale se propageait en Afrique, la Zambie avait choisi de dépenser 35 000 dollars pour organiser une large consultation nationale à travers les 30 districts du pays afin de recueillir l'opinion la plus répandue chez ses citoyens.

Les résultats de cette consultation, compilés par le ministère de la Justice sont finalement allés dans le sens d'un maintien de la Zambie dans le cercle des 124 pays signataires du Statut de Rome qui créa en 1998, la Cour pénale internationale. Prochaine étape pour Lusaka, défendre la position de non-retrait du Statut de Rome lors du prochain sommet de l'Union africaine à Addis-Abeba.

La Zambie va venir grossir le rang des pays africains qui soutiennent le maintien de l'Afrique dans la CPI. Sur cette liste soutenue par le Ghanéen Koffi Annan, ancien SG de l'ONU, la Zambie rejoint la coalition des pro-CPI dirigée par le Sénégal -qui préside l'Assemblée des Etats parties au Statut de Rome-, la Côte d'Ivoire, le Cap-Vert ou encore le Nigéria.

Menaces de retrait collectif des pays africains

En face, le divorce consommé du Burundi, le retrait manqué de l'Afrique du Sud, le retour de justesse de la Gambie à la faveur du changement de régime, ont conforté certains pays d'initier un projet de résolution non contraignante pour un retrait collectif de tous les pays africains de la CPI, accusée de ne poursuivre que des Africains.

Les statistiques ne plaident pas en faveur de la juridiction basée à La Haye, même si des enquêtes ont été ouvertes sur l'Afghanistan, l'Irak, la Colombie, la Palestine ou encore l'Ukraine, sur les dix «situations sous enquête» à la CPI, neuf concernent des pays africains.

Pire, la cour est accusée de partialité dans ses poursuites engagées sur la crise post-électorale de 2010-2011 en Côte d'Ivoire. L'ancien président ivoirien Laurent Gbagbo et ses proches sont les seuls à répondre des exactions de cette crise qui aura provoqué plus de 3 000 morts, alors que des anciens chefs de guerre impliqués sont en liberté.

Pour expliquer cette partialité de la CPI, on accuse le bureau de Fatou Bensouda de n'avoir ouvert aucune enquête sur les motivations de la guerre en Libye, malgré un rapport du parlement britannique accablant pour Nicolas Sarkozy et Tony Blair. A la place, la CPI réclame la tête de Seif Al Islam, le fils de Mouammar Kadhafi.

Autant d'exemples qui poussent des pays comme le Kenya dont l'actuel président a été acquitté par la CPI, le Rwanda, le Zimbabwe à un éventuel retrait collectif. Moins tranchée, la position de la Namibie qui conditionne son maintien dans le Statut de Rome à sa ratification par les Etats-Unis.

En lieu et place de la CPI, ces pays plaident pour l'élargissement de la Cour africaine de justice et des droits de l'homme, créée en 2014 et compétente pour 14 crimes universels. Mais, plusieurs pays tardent encore à ratifier son texte pour permettre de l'activer. Un manque d'inclusivité qu'il faudrait vite combler pour permettre à l'Afrique de juger ses propres fils. Mais les chefs d'Etat qui poussent des cris d'orfraie contre la CPI, sont-ils prêts à signer le texte ? Rien n'est moins sûr.

Ibrahima Bayo Jr.

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