Angola : Dos Santos se fabrique un « parapluie antiatomique » avant sa retraite dorée

Après 37 ans de règne, José Edouardo Dos Santos fera partie des rares chefs d’Etat africains à quitter le pouvoir tout en restant dans son pays. Avant de faire ce pari que d’aucuns jugeraient « risqué » dans une transition politique en Afrique, le président angolais a pris soin d’assurer ses arrières avant de transmettre le pouvoir. Après la retraite dorée votée par un parlement acquis à sa cause, les députés viennent de lui confectionner un parapluie antiatomique qui va lui permettre de couler des jours tranquilles.
Ibrahima Bayo Jr.

Une méfiance vis-à-vis de l'ambitieux général João Lourenço qui lui succède à la tête du parti au pouvoir et bientôt (peut-être) à la tête du pays ? Une mesure de prudence au cas où le Mouvement populaire pour la libération de l'Angola (MPLA), en difficulté dans un pays qui rêve d'essayer une nouvelle gestion, ne remporterait pas les élections générales du 23 août prochain ?

Son successeur affaibli, Dos Santos s'offre une retraite sure et dorée

Les tergiversations vont bon train, la polémique enfle après l'adoption d'une loi controversée, un mois seulement avant le scrutin qui devrait acter un changement à la tête de l'exécutif. Alors que José Edouardo Dos Santos - 74 ans dont 38 au pouvoir- a ouvert la voie à sa succession, le parlement angolais a adopté une nouvelle loi pour limiter les pouvoirs militaires et sécuritaires de son successeur.

Le texte approuvé par un parlement majoritairement dominé par le MPLA, reconduit pour les huit prochaines années, les hauts gradés militaires, les hauts fonctionnaires de police et les agents des services de renseignements. Plus loin encore, le prochain locataire du Palais rose ne pourra ni procéder à de nouvelles nominations à ces postes encore prononcer la révocation des personnalités nommées, déjà verrouillée par la loi.

« Une telle loi ne peut pas être adoptée à quelques semaines de la fin d'un mandat. De plus elle empêche le futur président de bien travailler », s'étouffe l'Union nationale pour l'indépendance totale de l'Angola (Unita). Ce parti d'opposition a de quoi s'indigner.

La polémique sur la limitation des pouvoirs de son successeur vient se greffer à la loi controversée adoptée en juin par le même parlement qui accorde, à coups d'avantages en natures et en privilèges, une retraite dorée à José Edouardo Dos Santos qui a décidé de se retirer du pouvoir.

Retraité sous son parapluie antiatomique, Zedu plus puissant que jamais

Cette loi prévoit un rehaussement de sa pension de retraite équivalent à 90% de son salaire actuel (6.700 dollars/mois), un statut de « président honoraire de la République » et l'abandon de tout poursuite contre le président. Au cours de sa retraite, les gardes du corps, le chauffeur et les voyages en première classe de José Edouardo Dos Santos et d'Ana Paula Lemos, la Première Dame, seront pris en charge par l'Etat angolais.

Avant son départ à la retraite du pouvoir, le président angolais s'est confectionné une sorte de « parapluie antiatomique » qui le rend quasi-intouchable. Les projections de cet ingénieur des télécoms qui a fait ses classes auprès des nationalistes qui ont lutté pour l'indépendance, ne sont des calculs de novice en politique.

La réforme de la constitution, adoptée en 2010 sous le magistère Dos Santos, prévoit désormais de choisir le président de la République angolaise non plus au suffrage universel direct, mais au sein du parti arrivé en tête des élections générales. Un pari risqué pour le MPLA, grand favori du prochain scrutin malgré une perte de vitesse après une gestion étatique de plusieurs décennies que l'opposition compte exploiter au maximum.

D'un autre côté, le président sortant angolais cultive la prudence vis-à-vis du général João Lourenço qui prend sa succession à la tête du MPLA et -si le parti remporte les élections- sur le fauteuil du Palais rose. Dès 2003, cet ex-ministre de la Défense de 63 ans avait payé d'un écartement du pouvoir de plusieurs années, son ambition un trop tôt affiché de succéder à Zedu après des rumeurs d'« abdication ».

Dans le cas, peu probable, que son parti perde les élections ou avec l'arrivée au pouvoir João Lourenço, le Président Dos Santos réalise ici un coup politique qui lui permet de couvrir ses arrières. Face à un président dépouillé d'une partie de ses pouvoirs et encerclé par des hommes à lui, Zedu peut couler des jours calmes et heureux. Mais qui connait l'homme doit aussi savoir qu'il compte garder un œil sur la vie politique et l'influencer de loin depuis son rocking-chair. Un président de l'ombre sans les contraintes de la fonction la plus convoitée d'Angola !

Ibrahima Bayo Jr.

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