RDC : lundi 19 décembre, le jour le plus long pour l’avenir

19 décembre 2016 à 23h59. C’est en principe à cette date précise que Joseph Kabila Kabange doit consommer son second et dernier mandat constitutionnel à la tête de la RDC qu’il dirige depuis 16 ans. Mais à la faveur d’un accord politique conclu avec une frange de l’opposition, le président congolais avait fait prolonger son mandat jusqu’en avril 2018. Partira-t-il ce lundi au soir au moment où une autre partie de l’opposition et des mouvements citoyens lui promettent des manifestations monstres sur fond de coupure programmée des réseaux sociaux? Les Congolais s'apprêtent à compter les heures du jour le plus long de leur avenir politique.
Ibrahima Bayo Jr.
Les avenues désertées de Kinshasa en ce 19 décembre 2016

Le compte à rebours est lancé. Constitutionnellement, Joseph Kabila égrène ses dernières heures au Palais de la Nation à Kinshasa. A minuit (GMT+1), il ne sera plus, en tout cas selon la constitution, le président de la République du Congo.

Alors que la loi fondamentale lui interdit de se présenter à un troisième mandat, un accord politique conclu à la mi-octobre entre la majorité présidentielle et l'opposition avait fini par décider du maintien au pouvoir de Joseph Kabila jusqu'en avril 2018. Motif officiel : manque de moyens pour financer les élections et un fichier électoral non renouvelé. La cour constitutionnelle congolaise avait fini par entériner ce maintien au fauteuil de Joseph Kabila qui avait désigné Samy Badibanga comme premier ministre.

Accord rejeté par une autre partie de l'opposition dite du « Rassemblement », menée par Etienne Tshisekedi, qui réclame le respect de l'échéance et le départ du président sortant. Les négociations de la « dernière chance » menée par la Conférence épiscopale nationale du Congo (Cenco) pour tenter d'éviter au pays une spirale de violence s'est soldée par une suspension des discussions jusqu'au 21 décembre prochain.

Lundi 19 décembre minuit, l'heure du bouleversement ?

Ce lundi est donc le jour où se décide l'avenir politique de la RDC. Certains y voient l'heure du bouleversement et continuent de croire que Joseph Kabila va être sensible aux appels au départ. Dans ce pays qui n'a connu que deux élections "régulières", d'autres semblent s'être résignés au maintien de Kabila. Le « Rassemblement » n'a pas donné de mot d'ordre mais appelle « les Congolais à prendre leurs responsabilités ». A contrepied, certains partis d'opposition se sont joints aux mouvements citoyens comme Filimbi, Lucha pour appeler les citoyens à descendre massivement de manière pacifique dans les rues des grandes villes.

En embuscade, le pouvoir a pris les devants. Un important dispositif sécuritaire a été déployé à Kinshasa et dans les grandes villes. Toutes les demandes d'autorisation de marches ont été rejetées et les autorités congolaises ont interdit toute manifestation. Auparavant, les journées ont été rythmées par les arrestations d'opposants et d'activistes ou de leurs proches si ce n'est l'expulsion de journalistes étrangers sous de fallacieux prétextes. Les étudiants ont été confinés dans leurs universités au moment où des Congolais fortunés ont quitté le pays avec leurs familles. Dans la foulée, les chancelleries occidentales ont demandé à leurs ressortissants de quitter le pays. Les Congolais restés sur place hésitent encore sur la marche à suivre. Le pays retient son souffle.

Les réseaux sociaux muselés

Derniers exutoires à la colère, les réseaux sociaux vont être coupés dans tout le pays sur ordre du pouvoir. Le débranchement du "câble" prévu ce lundi même devrait plonger la RDC dans un huis-clos comminatoire pour le jour le plus long de l'année où se décide l'avenir du pays. Certains Congolais ont eu recours à des applications pour échanger des messages hors connexion internet. Au sein de la diaspora, l'angoisse de rester sans nouvelles du pays est paralysante.

Pendant ce temps, Joseph Kabila, tout comme son gouvernement, ne semble pas avoir été ébranlé ni par les sanctions économiques américaines, ni par les révélations sur la toile de l'empire économique tissée dans le pays par le clan Kabila. Comme à son habitude, le président Kabila s'est muré dans une tour de silence qui ajoute du suspense à cette journée qui promet d'être confuse.

Une quiétude qui fait craindre une tempête semblable à celle du 19 septembre dernier, lorsque des manifestations réclamant, 90 jours avant la fin du mandat de Kabila (comme le veut la constitution), la convocation de nouvelles élections, avaient été violemment réprimées. Le bilan s'était alors chiffré à 53 morts selon l'ONU, plus selon les opposants.

Pourtant dans son discours sur l'état de la Nation, Joseph Kabila assurait que : « n'ayant jamais été violée, la Constitution sera respectée dans toutes ses dispositions ». La date des nouvelles élections n'est toujours pas connue et encore moins le début du renouvellement du fichier électoral. Le subterfuge de Kabila consacrant son « glissement » semble bien fonctionner. Ce lundi est celui de tous les espoirs, de tous les dangers ... et de toutes les peurs. Tout le monde sait que la nuit qui va tomber sur la RDC promet d'être longue. Alors les congolais se cloîtrent et prient le ciel d'apporter le soleil et la lumière qui lèvera l'aube sur le pays!

Ibrahima Bayo Jr.

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