Finance islamique : l'Afrique se rue sur les Sukuk

C'est la nouvelle tendance du moment : les pays africains ont de plus en plus recours aux obligations islamiques, les Sukuk, pour financer leurs projets de développement notamment dans les infrastructures. La réussite des premières opérations sukuk a confirmé cette dynamique aux perspectives encore plus prometteuses puisque le potentiel de cette niche est estimé à plus de 700 milliards de dollars en 2017.
(Crédits : Shutterstock)

C'est le Soudan qui fut le premier pays du Continent à se lancer dans l'émission des Sukuk, en 2007, à une époque où la finance islamique ne suscitait encore guère d'intérêt, surtout en Afrique. En juillet 2014, le Sénégal levait avec succès 100 milliards de FCFA sur le marché des obligations islamiques avant de rééditer l'opération quelques mois plus tard en même temps que d'autres pays comme l'Afrique du Sud, le Togo et de nouveau le Soudan.

Depuis, le rythme n'a cessé de s'accélérer avec des séries d'émissions de sukuk, réalisées ou projetées par plusieurs pays notamment la Côte d'Ivoire, l'Égypte, le Nigeria, la Tunisie, le Niger ainsi que dernièrement le Maroc et certains pays d'Afrique de l'Est. Avec l'aide de certains partenaires financiers spécialisés dans le domaine, comme la SID (ICD, en anglais), la filiale dédiée au secteur privé de la Banque islamique de développement (BID), c'est presque un mouvement d'ensemble qui émerge en faveur des émissions islamiques.

C'est le cas de le dire, la finance islamique a le vent en poupe sur le Continent et même si les émissions restent encore assez marginales au vu du potentiel, les perspectives de croissance promettent de beaux jours pour cette niche, source de nouveaux financements pour l'Afrique. Il faut dire qu'avec les difficultés des levées de fonds sur le marché de la finance traditionnelle, surtout avec l'amenuisement des marges et le retour des inquiétudes relatives à un nouveau cycle d'endettement de l'Afrique, la finance halal s'est imposée comme une providence pour les pays africains qui semblent avoir enfin flairé le filon.

Croissance vertigineuse

Selon les estimations faites par Ernst & Young, le marché mondial des sukuk, qui était de 220 milliards en 2016, devrait grimper à 680 milliards d'euros cette année. Une croissance vertigineuse à tout point de vue car, si les émissions des sukuk ne représentent à l'heure actuelle que moins de 2 % du marché mondial des eurobonds, elles sont passées de quelque 20 milliards de dollars en 2005 à un peu plus de 115 milliards une dizaine d'années plus tard. Ce qui donne largement une idée du chemin parcouru en si peu de temps. D'autant plus que le potentiel de croissance est encore énorme, car porté par l'arrivée de nouveaux investisseurs, principalement des pays du Golfe mais aussi des économies émergentes d'Asie. À la suite des fonds malaisiens, singapouriens, indonésiens ou pakistanais ainsi que ceux du Moyen-Orient, lesquels ont déjà investi le créneau, c'est la Chine et dans une moindre mesure la Russie qui préparent leur entrée sur le marché du capital investissement conforme aux lois islamiques.

Les émissions respectant la charia vont donc continuer à croître à une vitesse sans précédent, d'autant plus que la demande explose - même au sein des pays développés, comme le Royaume-Uni qui a déjà émis des sukuk - alors que les investisseurs internationaux sont en quête de débouchés - surtout les fonds dopés aux pétrodollars. Autant d'opportunités pour les pays africains qui font face à une impérieuse nécessité de diversification de leurs sources de financement. Il reste toutefois à opérer les réglages nécessaires pour pouvoir en tirer pleinement profit, à travers une véritable restructuration du système financier africain et un cadre réglementaire propice à rassurer et donc attirer les investisseurs.

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