CNUCED : sur le Continent, 4 touristes sur 10 sont Africains

D'après le dernier rapport de la CNUCED sur le développement économique en Afrique, les Africains sont en passe de devenir la principale population du tourisme sur le Continent. Publié ce 5 juillet, le rapport met en relief l’importance de plus en plus stratégique de l’industrie touristique en Afrique, ainsi que son potentiel pour une croissance inclusive et durable.
Selon la CNUCED, les arrivées de touristes en Afrique devraient croître de 5% par an entre pour atteindre 134 millions d'ici à 2030,

En Afrique subsaharienne, 2 touristes sur 3 sont des Africains et pour l'ensemble du continent 4 touristes internationaux sur 10 sont des Africains, selon le dernier rapport sur le développement économique en Afrique de la Conférence des Nations Unies pour le commerce et le développement (CNUCED). Publiée ce 5 juillet à Genève, l'édition 2017 du rapport a été consacrée au tourisme, un secteur au service d'une croissance transformatrice et inclusive selon l'organisation. Les données compilées dans l'étude montrent en effet «que contrairement à ce que l'on pourrait croire, ce sont les Africains qui tirent de plus en plus la demande touristique en Afrique».

Dans le sillage des dernièrs rapports du même genre et ayant porté sur la même thématique, la CNUCED a mis en exergue le poids que prend de plus en plus le secteur dans le développement des économies africaines et tout le potentiel de croissance qu'elles peuvent en tirer. Le tourisme est un secteur en plein essor qui représente plus de 21 millions d'emplois, soit 1 emploi sur 14 sur le Continent. Toujours selon le rapport, l'Afrique a affiché ces vingt dernières années une croissance dynamique, puisque chaque année de la période 1995-2014, le nombre d'arrivées de touristes internationaux a augmenté de 6% et les recettes touristiques de 9%.

Afin de mieux mesurer la dynamique du secteur, le rapport a présenté et comparé des données relatives à deux périodes distinctes (1995-1998 et 2011-2014) en concluant que le nombre d'arrivées de touristes internationaux en Afrique est passé de 24 à 56 millions. Les recettes d'exportation du tourisme ont plus que triplé durant la même période, passant de 14 milliards de dollars à près de 47 milliards. Ainsi, le tourisme représente aujourd'hui environ 8,5% du PIB de l'Afrique.

Potentiel de croissance

Selon la CNUCED, «en raison de sa nature intersectorielle, le tourisme peut contribuer à la promotion de la transformation structurelle en Afrique». En plus de contribuer à une plus grande diversification des économies et au développement des entreprises, le tourisme est également un moteur essentiel de la création d'emplois et de richesse, grâce notamment à son impact sur l'évolution du commerce des biens et des services.

En 2015, le secteur employait directement plus de 8,8 millions de personnes et d'après les prévisions, le nombre d'emplois devrait atteindre 11,7 millions, en hausse de 2,5 %, entre 2016 et 2026. C'est assurément ce qui explique que le premier plan décennal de mise en œuvre de l'Agenda 2063 de l'Union africaine vise à doubler la contribution du tourisme au PIB de l'Afrique. Ce qui, selon la CNUCED, exige une croissance plus rapide et plus importante du secteur du tourisme.

«Le tourisme est un secteur dynamique qui dispose d'un extraordinaire potentiel en Afrique. Bien géré, ce secteur peut largement contribuer à la diversification et faciliter l'inclusion des communautés vulnérables». Mukhisa Kituyi, secrétaire général de la CNUCED.

La CNUCED a par conséquent recommandé aux pays africains de renforcer davantage leurs politiques de développement pour tirer pleinement profit des perspectives que recèle le secteur. La croissance du secteur intra-régional offre à cet effet de réels leviers pour l'expansion du secteur. Selon la CNUCED, pour mettre le potentiel du tourisme intra régional au service de la croissance économique du Continent, les gouvernements africains devraient prendre des mesures pour libéraliser les transports aériens, promouvoir la libre circulation des personnes, garantir la convertibilité des monnaies et surtout, reconnaître la valeur du tourisme africain et l'intégrer dans leurs plans. «Ces mesures stratégiques peuvent produire des effets assez rapides et concrets», a souligné le rapport en s'appuyant sur l'exemple du Rwanda où la suppression, en 2011, des formalités de visa pour les membres de la Communauté d'Afrique de l'Est a contribué à la hausse du nombre de touristes intra-régionaux (283 000 en 2010 à 478 000 en 2013).

Aussi, si jusque-là, seuls 12 pays africains appliquaient la Décision de Yamoussoukro de 1999, la libéralisation de l'espace aérien africain pourrait créer 155 000 emplois, entraîner une augmentation du nombre de passagers de près de 5 millions, contribuer à hauteur de presque 1,3 milliard de dollars au PIB du Continent et se traduire par un gain de 1 milliard de dollars pour les consommateurs.

La relation, «mutuellement bénéfique entre la paix et le tourisme», figure parmi les autres thèmes importants abordés dans le rapport de la CNUCED : «La paix est bien évidemment essentielle au tourisme», rappelle-ton dans le document qui fait cas du fait qu'une région instable peut suffire à dissuader les touristes de s'y rendre pendant longtemps, engendrant ainsi des répercussions économiques désastreuses même si la perception d'un danger ne correspond pas toujours à la réalité.

C'est ce que montre d'ailleurs l'impact de l'épidémie d'Ebola qui s'est déclarée en 2014 en Afrique de l'Ouest et coûté très cher à l'Afrique tout entière du point de vue du nombre de touristes et des recettes touristiques. «Bien que cette épidémie ait touché un nombre relativement faible de pays situés dans la partie occidentale du Continent, le nombre d'arrivées de touristes et de réservations a baissé dans des pays qui n'étaient pas concernés par l'épidémie, tels que l'Afrique du Sud et la République de Tanzanie», a rappelé la CNUCED.

De même, l'instabilité politique peut avoir des répercussions très importantes et persistantes sur l'économie. En Tunisie par exemple, l'instabilité politique des années 2009 à 2011 a entraîné une baisse du montant total des recettes du tourisme de 27% en moyenne, le faisant passer de 3,5 milliards de dollars à 2,5 milliards de dollars.

Pour assurer la croissance du tourisme en Afrique, «il est capital que les gouvernements africains et les institutions régionales règlent les problèmes de sûreté et de sécurité et répondent rapidement aux crises», conseille la CNUCED. Le rapport estime aussi qu'il est indispensable de promouvoir des stratégies permettant d'améliorer l'image que les médias du monde entier donnent de l'Afrique, «si l'on veut garantir la reprise du secteur après un conflit ou une période marquée par des troubles politiques».

 Des chiffres qui parlent

Dans son rapport, la CNUCED a également mis en avant certains chiffres qui, en plus de témoigner du dynamisme du secteur en Afrique, mettent en lumière certaines spécificités de l'industrie touristique sur le Continent. Ainsi, si pendant les dix prochaines années, 11,7 millions d'emplois devraient être créés en Afrique grâce à la croissance soutenue du tourisme sur le continent. Fait distinctif, plus de 30% des entreprises touristiques sont dirigées par des femmes et 36 % des ministres du Tourisme du continent sont des femmes, ce qui représente le pourcentage le plus élevé au monde. De manière générale et au niveau mondial, les femmes représentent entre 60% et 70% de la main-d'œuvre du secteur, dont la moitié est âgée de 25 ans ou moins. C'est également le cas en Afrique, où 47% des employés des hôtels et des restaurants sont des femmes.

Sur la période  2011 à 2014, l'Égypte (9,9 millions), le Maroc (9,8 millions), l'Afrique du Sud (9,2 millions) et la Tunisie (6,8 millions) ont enregistré en moyenne les arrivées de touristes internationaux les plus importantes. Ces quatre pays ont accueilli 64% de l'ensemble des arrivées de touristes internationaux en Afrique sur les trois années. En 2015 pourtant,  le Maroc a été le seul pays africain à recevoir plus de 10 millions de touristes internationaux, alors que l'Afrique a accueilli la même année, 4,4 % des arrivées mondiales de touristes et a bénéficié de 2,3 % des recettes touristiques mondiales.

Selon toujours la CNUCED, le nombre d'arrivées de touristes sur le continent devrait croître de 5% par an entre 2010 et 2030 pour atteindre 134 millions à terme 2030, avec des touristes africains qui deviendraient beaucoup plus nombreux que les internationaux.

En 2015, la contribution directe du tourisme au PIB de l'Afrique s'est élevée à 73 milliards de dollars et devrait s'établir à 121 milliards de dollars d'ici à 2026. La contribution directe du tourisme au PIB réel a progressé en moyenne annuelle de 2,6% en 2011 2014.

 «En créant des liens solides entre les secteurs du tourisme, de l'agriculture et de l'infrastructure, l'écotourisme et les segments médical et culturel du marché touristique peuvent favoriser la diversification vers des activités à plus forte valeur ajoutée et permettre une répartition plus large des revenus. Pour exploiter ce potentiel, les gouvernements africains devraient adopter des mesures visant à favoriser l'approvisionnement local, encourager les entités locales à participer à la chaîne de valeur touristique et stimuler le développement de l'infrastructure. S'il bénéficie de ces investissements pérennes, le secteur du tourisme pourrait sortir des millions de personnes de la pauvreté tout en contribuant à la paix et à la sécurité de la région». CNUCED.

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.