Nigeria : le FMI pas très convaincu par la recette de Buhari

Le Fonds monétaire internationale (FMI) n’est visiblement pas très convaincu de la stratégie de relance économique que le Nigéria vient de lancer pour faire face à la crise qu’il traverse depuis quelques années. En mission dans le pays, les experts du Fonds ont alerté sur la nécessite d’engager des réformes urgentes afin de stabiliser la croissance et rendre l’économie nigériane plus compétitive.

C'est le FMI qui le dit : « sans de véritables réformes structurelles urgentes, les perspectives seront des plus sombres pour le Nigéria ». Ce n'est pas la première fois que le fonds alerte les autorités du pays sur les risques auxquels fait face l'économie du pays depuis quelques années et qui a été aggravé par une conjugaison de facteurs internes et de chocs extérieurs, mais cette fois, l'alerte va au delà des traditionnels recommandations qu'adressent régulièrement l'institution de Brettons Woods à ses pays membres.

En mission dans le pays, des experts du FMI ont cette semaine réitérer leurs inquiétudes auprès du gouvernement fédéral, ce qui tombe mal pour ces derniers. Le mercredi, le président Buhari a en effet officiellement lancé sa stratégie de relance et de la croissance économique, un plan composé d'une soixantaine de mesures pour booster la dynamique de croissance du pays et rendre le pays plus attractif. La recette que le chef d'Etat nigérian a qualifié de panacée pour « non pas seulement à restaurer la croissance de notre économie mais aussi et surtout à la rendre globalement plus compétitive » ne semble guerre susciter l'optimisme du FMI qui juge les mesures « insuffisantes ».

Il est vrai que ce n'est pas le premier avis du genre, beaucoup d'analyses et d'institutions qui se sont penchés sur les différents aspects de la stratégie ont mis en évidence certains objectifs assez vague et audacieux. C'est le cas avec l'ambition de porter le rythme de croissance du PIB à une moyenne de 7% d'ici trois ans alors même que le pays qui est entré en récession, en septembre dernier, ne pourrait terminer l'année qu'avec un taux de 1,5% si la lente reprise amorcé depuis le début de l'année se poursuit.

Le naira sous pression

A l'évidence, pour le FMI, l'issue de sortie de crise pour l'économie nigériane tient en une seule politique. Il s'agit pour le pays, d'abandonner la politique actuelle de taux de change, laquelle se traduit par une surévaluation de la naira, entraînant par ricochet  « une dépréciation chaotique du taux ».

L'année dernière, la naira a en effet  perdu près de 30% de sa valeur face aux dollars, accentuant ainsi la pression sur le président Buhari qui s'était montré hermétique à une telle mesure. Il a fallut ces derniers mois, et en son absence pour congé médicale à Londres, pour qu'une libéralisation progressive du régime de change entre en vigueur. Depuis le début de l'année, la monnaie locale semble avoir retrouvé des couleurs grâce notamment aux mesures lancées par la Banque centrale nigériane (BCN) qui soutient, à coup de cash, les efforts du gouvernement fédéral de stabiliser la dégradation des indicateurs macroéconomiques du pays.

L'alerte du FMI risque d'amplifier davantage la pression sur les autorités fédérales surtout à l'heure où le Nigéria négocie des prêts et des levées des fonds sur  les marchés financiers. Le lancement de la stratégie de redressement économique devrait permettre de rassurer les investisseurs et autres partenaires financiers comme la Banque africaine de développement (BAD) mais avec cette appréciation peu reluisante du FMI, le gouvernement nigérian va devoir faire encore plus pour convaincre. D'autant plus que les enjeux sont stratégiques pour Buhari qui, à mi-mandat, fait face à une explosion des contestations sociales dans un climat marqué par une réduction drastique des marges de manœuvres budgétaires.

Les marchés toujours dans l'expectative

Le Nigéria a plus que jamais besoin de plus de fonds pour relancer son économie en misant sur le secteur pétrolier dont il est fortement dépendant mais aussi et surtout en la diversifiant par le biais d'autres secteurs au potentiel confirmé comme l'agriculture et l'industrie. C'est à cette condition que le pays pourrait atteindre une croissance assez forte et durable, ce qui lui permettrait de prendre en charge les défis sociaux ambiants et aussi retrouver sa place de première économie du continent.

Pour l'heure, les marchés sont donc dans l'expectative.  A la décharge des autorités, de nouvelles mesures ont été adoptés ces dernières semaines pour améliorer l'environnement des affaires et soutenir le secteur industriel du pays notamment les PME/PMI. En plus de l'opérationnalisation « express » d'une nouvelle banque de développement destinée à ces entreprises de petite et moyenne taille qui constitue l'essentiel du tissu industriel et des activités économiques du pays, des mesures ont été adoptés pour simplifier les procédures en matière de création d'entreprises.

Il va falloir donc attendre pour voir si ces mesures vont porter leurs fruits mais le temps presse et pour les marchés, les autorités fédérales devraient donner des signaux forts pour rassurer les potentiels investisseurs.

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