Croissance : la Banque mondiale et le FMI anticipent un léger rebond pour l’Afrique

La croissance en Afrique subsaharienne devrait rebondir en 2017 selon les dernières prévisions des deux principales institutions de Bretton Woods qui viennent de publier leurs dernières appréciations des perspectives économiques mondiales. Les pays ne sont certes pas logés à la même enseigne, mais la reprise de la croissance mondiale à laquelle se conjugue une légère remontée des cours des matières premières augurent une nouvelle éclaircie pour l’économie du continent. Il va falloir désormais accélérer le rythme des réformes structurelles afin d’atténuer les risques et ainsi permettre aux pays africains de retrouver leur dynamisme. Selon la Banque mondiale, par exemple, l’intensification des investissements dans les infrastructures pourra permettre d’atteindre enfin la vitesse de croisière nécessaire pour une croissance soutenue, durable et surtout inclusive.

L'hirondelle ne fait certes pas le printemps mais, c'est indéniablement un signe annonciateur. C'est à peu près ce qu'il convient de tirer des dernières appréciations de l'évolution des perspectives économiques en Afrique subsaharienne que viennent de rendre public, le FMI et la Banque mondiale. Les deux institutions qui tiennent, du 17 au 23 avril à Washington, leur traditionnelle réunion conjointe annuelle de printemps ont en effet actualisé leurs prévisions de croissance, en s'appuyant sur l'évolution de l'économie mondiale de ces derniers mois mais aussi et surtout pour les prochains trimestres de l'année en cours ainsi que des projections pour les deux prochaines années.

Selon les deux institutions, le rythme de croissance de l'économie subsaharienne devrait rebondir à 2,6% cette année après le mauvais cru enregistré en 2016 où il n'a progressé que de 1,4% selon les dernières estimations, soit son niveau le plus bas depuis presque deux décennies. Ce rebond, légèrement plus consistant que les prévisions publiées en octobre dernier, s'inscrit également dans la même dynamique que connait la croissance mondiale qui devrait aussi connaitre une très légère amélioration cette année avec un taux de 3,5% contre 3,4% attendue quelques mois plutôt.

« Cette reprise reste néanmoins faible, et la croissance économique ne devrait se situer que légèrement au-dessus de la croissance démographique, soit un rythme qui entrave les efforts en faveur de l'emploi et de la réduction de la pauvreté ».

Comme l'appréhende la Banque mondiale, « les perspectives économiques mondiales s'améliorent et devraient favoriser la reprise dans la région ». Ainsi, dans sa dernière édition du rapport Africa's Pulse, le 15e  du genre de cette publication semestre qui analyse et apprécie chaque six mois, la Banque mondiale anticipe une poursuite de l'amélioration des perspectives mondiales avec en toile de fond, une croissance globale de l'Afrique subsaharienne qui devrait passer à 3,2 % en 2018 et à 3,5 % en 2019. Selon le rapport qui a été publié ce mercredi en marge de la réunion de printemps, cette dynamique reflète la reprise dans les principales puissances économiques du continent.

Reprise en vue pour les principales économies du continent

L'embellie ou plutôt l'éclaircie est en vue pour le continent qui a payé, depuis 2014, un lourd tribut à la baisse drastique des matières premières sur les marchés internationaux. Si les pays exportateurs, notamment de pétrole, ont été les premiers à accuser le coup, l'onde de choc de la conjoncture a vite rejaillit dans les autres pays voisins comme c'était le cas avec le Nigéria en Afrique de l'Ouest ou l'Afrique du sud dans la zone australe. La bonne nouvelle des perspectives actualisées, c'est que ces pays, principales économies du continent, vont progressivement sortir de la mauvaise passe qu'ils traversent depuis quelque temps. Le Nigéria, l'Afrique du Sud et l'Angola, devront par conséquent profiter du rebond en cours, même si d'après les projections, « ce redressement est lent en raison d'un ajustement insuffisant par rapport à la baisse des prix des matières premières et à l'incertitude des politiques ».

Selon le FMI, grâce à une amélioration de sa production pétrolifère mais aussi agricole, le Nigeria va sortir de la récession alors que la croissance en Angola devrait être tirée par les retombées de la stratégie de diversification économique entamée il y a quelques années par les autorités afin de réduire sa dépendance à l'or noir. De son coté, l'Afrique du Sud devrait également profiter de la relative embellie des cours des matières premières pour dynamiser sa croissance, en dépit des incertitudes socio-économiques et politiques qui se sont accentués ces derniers mois.

Les nouveaux moteurs de la croissance africaine

Selon les données compilées par Africa's Pulse, « sept pays africains continuent de montrer une résilience économique, aidés en cela par la demande intérieure ». Il s'agit de la Côte d'Ivoire, l'Éthiopie, le Kenya, le Mali, le Rwanda, le Sénégal et la Tanzanie. Des pays qui ont affiché des taux de croissance annuels supérieurs à 5,4% entre 2015 et 2017 et qui concentrent près de 27% de la population de la région en plus de représenter 13% de son PIB total.

« La croissance demeurera atone dans les pays exportateurs de pétrole, alors qu'elle devrait repartir modestement dans les pays exportateurs de métaux », anticipe la Banque mondiale qui souligne par la même occasion que celle des pays dont les économies sont moins tributaires des matières premières « devrait rester forte, soutenue par les investissements dans les infrastructures, des secteurs de services résilients et le redressement de la production agricole ». C'est le cas particulièrement en Éthiopie, au Sénégal et en Tanzanie.

Risques et opportunités de croissance

L'analyse des perspectives de croissance des pays d'Afrique subsaharienne n'a pas manqué de mettre en évidence, comme d'habitude, la persistance de certains risques qui sont de nature à atténuer le rebond attendu. Parmi les risques majeurs relevés par la Banque mondiale, « le durcissement plus important que prévu des conditions de financement sur les marchés mondiaux, une amélioration moins franche des prix des matières premières et une montée du protectionnisme ». Sur le plan intérieur également, d'autres risques tiennent au rythme inadéquat des réformes, à l'accroissement des menaces de sécurité et à un climat d'incertitude politique avant les élections dans certains pays.

« Alors que les pays procèdent à des ajustements budgétaires, nous devons faire en sorte que la conjoncture demeure propice à l'investissement afin que les pays d'Afrique subsaharienne connaissent une reprise plus forte », explique en ce sens Albert Zeufack, économiste en chef de la Banque mondiale pour la région Afrique.

Le rapport met en évidence que le ralentissement de la croissance économique intervient à un moment où le continent doit impérativement entreprendre des réformes pour stimuler l'investissement et s'attaquer à la pauvreté. « Les pays doivent également engager des dépenses indispensables pour le développement tout en évitant d'accroître leur dette à des niveaux insoutenables », recommande la Banque mondiale pour qui dans le contexte actuel, la promotion des investissements publics et privés, notamment dans les infrastructures, est une priorité.

Le revers de la médaille, et qui s'explique dans certains cas par la morosité économique des dernières années, c'est que selon les données, la région a enregistré un recul de la croissance des investissements, de près de 8 % en 2014 à 0,6 % en 2015. Pour  Punam Chuhan-Pole, économiste principal à la Banque mondiale et auteur du rapport, « la croissance doit être plus inclusive et nécessitera de s'attaquer au ralentissement de l'investissement et aux coûts logistiques élevés des échanges qui nuisent à la compétitivité. »

C'est dans cette logique et en guise de recommandations pour les pays africains, le rapport a de nouveau plaidé pour une mise en œuvre urgente de réformes visant « à améliorer les institutions qui promeuvent la croissance du secteur privé, développer les marchés financiers locaux, améliorer les infrastructures et renforcer la mobilisation des ressources intérieures». Autant de défis persistants qui continuent à contrarier la dynamique de croissance économique du continent et que les gouvernements des pays africains ont intérêt à prendre en compte pour accélérer la transformation économique du continent selon la Banque mondiale.

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