Crise au Togo : d'un ton ironique, Faure Gnassingbé s'exprime enfin

Alors que le monde entier, attendait qu'il prenne la parole, le chef de l'État togolais Faure Gnassingbé a finalement donné ses impressions sur la crise que traverse son pays. Lors du congrès de son parti « Unir », sur un ton ironique, le président a fait allusion à des « mensonges » sur sa personne.

C'est ce 28 octobre 2017 à Tsévié, 35 km au nord de Lomé la capitale togolaise, que le chef de l'Etat togolais Faure Gnassingbé a choisi de s'exprimer sur la crise politique qui secoue le pays depuis plus de deux mois. Au premier congrès statutaire de son parti politique, Union pour la République (UNIR), créé depuis plus de 5 ans, le numéro 1 togolais est arrivé vers la fin de la journée dans un bain de foule et avec un décor sécuritaire impressionnant, dans un style décontracté avec une veste aux couleurs du parti et sans cravate.

Dans son discours, non à la nation, mais aux militants du parti, le président togolais a d'abord reconnu que son pays traversait une crise. « Nous vivons un moment difficile, mais à chaque fois il faut faire preuve de courage et de force. Tôt ou tard, la vérité finit par triompher. Toutes les solutions ne sont pas faciles mais grâce de Dieu, grâce à l'intelligence et l'amour pour notre patrie, nous y arriverons », a déclaré Faure Gnassingbé. Selon lui, la crise ne doit pas prendre dessus. Il a expliqué que le pays a connu ce genre de moments et en connaîtra d'autres encore. Mais à chaque fois « il faut s'armer de courage, de patience et de force pour surmonter l'épreuve », a exhorté le président de Unir, chef de l'Etat togolais.

Faure Gnassingbé a ensuite appelé à l'efficacité au service du pays, expliquant que c'est ce qui comptait le plus à ses yeux. « Nous avons suffisamment démontré que nous sommes forts, nous sommes sereins et nous sommes optimistes », a-t-il harangué ses milliers de sympathisants. Mais il ne manquera pas de charger l'opposition la traitant d'user de mensonge.

« J'ai découvert que j'étais un dictateur sanguinaire »

Le président togolais s'est voulu très ironique accusant l'opposition de déformer les faits et de présenter des images fausses de sa personne, pointant particulièrement du doigt les réseaux sociaux.

« Vous en conviendrez avec moi... Aujourd'hui, ceux qui intoxiquent et mentent ont trouvé un allié dans la technologie. On peut transformer une chose juste ou alors, un homme simple comme moi en dictateur sanguinaire. J'ai découvert que j'étais un dictateur sanguinaire », s'est ainsi exprimé Faure Essozimna Gnassingbé

Il tempère ensuite son propos : « mais être parmi vous ce matin et voir l'accueil que vous m'avez réservé, cela me réconforte. Effectivement, la vérité finit toujours par triompher ». Justement pour cet accueil, le président togolais a rendu grâce au Ciel pour l'opportunité du congrès qui « permet aux militants du parti de se retrouver ».

En effet, tentant de répondre à l'opposition qui estime que le parti au pouvoir ne peut plus rien faire, le numéro 1 togolais a indiqué qu'une bonne partie des solutions se trouve au sein du parti Unir et que même si toutes les solutions ne sont pas faciles, « avec la grâce de Dieu, avec les intelligences, les talents et l'amour de la patrie », tout peut être résolu.

Décidé à finir son mandat malgré l'opposition

A la coalition des 14 partis de l'opposition qui demandent un départ immédiat du chef de l'Etat, Faure Gnassingbé envoie un message très clair. Il rappelle qu'il est le président de la République et qu'il jouit de la majorité de son parti à l'Assemblée nationale. « Nous avons la chance, nous avons l'honneur d'être responsables des institutions les plus importantes de notre pays. Le peuple nous a donné la Présidence et il nous a donné une majorité à l'Assemblée nationale », a insisté le président togolais. On aura compris que le chef de l'Etat est décidé à finir son mandat et qu'il compte poursuivre les réformes constitutionnelles comme il l'entend et non comme l'opposition et ses militants le réclament.

Faure Gnassingbé peut compter sur le soutien de ses militants et de plusieurs patrons des institutions de la République qu'il a nommé, dont l'armée, « la grande muette ». Lors des cérémonies d'hommage rendus au capitaine Mazamaesso Tangaou, mort en août dernier au Mali, au sergent Aklesso Hélim et au caporal-chef Sizing Atcham Natchamba, tous deux morts à Sokodé (337 km au nord de Lomé), dans la nuit du 16 octobre, après l'arrestation de l'Iman Hassan Mollar, le général Félix Katanga, chef d'état-major général des Forces armées togolaises (FAT) a exprimé au chef de l'Etat togolais, le soutien « total » de l'armée aux institutions de la République et son ferme attachement à sa « politique de paix, de réconciliation et de dialogue ». Dernièrement, cette armée n'a pas lésiné sur les moyens pour réprimer les manifestations de l'opposition des 18 et 19 octobre, accompagnant même parfois les milices, selon ceux qui étaient présent sur le terrain.

Un congrès qui contraste avec des manifestations dans la diaspora

Le congrès statutaire du parti présidentiel n'était pas le seul rassemblement politique togolais de ce samedi 28 octobre 2017. A quelques kilomètres seulement de Lomé, au Ghana voisin, des Togolais de la diaspora tenaient un meeting dans un stade à Accra. On pouvait voir sur les pancartes et banderoles plusieurs messages hostiles au président togolais. « Sauvons le Togo », « libérez les imams », « stop killing children », etc. Dans le sens inverse, de l'autre côté du Togo, au Bénin, les manifestations de l'opposition ont eu lieu à Cotonou. « Faure dégage ! », « libérez l'imam Hassan Mollah », « Sauvons le Togo », « 50 ans, ça suffit ! », tels ont été les messages envoyés. Au même moment, en Europe, les togolais de la diaspora sont sortis. Aux Pays-Bas, en Allemagne, les mêmes slogans ont été scandés.

L'opposition qui avait appelé par Tikpi Atchadam, président du Parti national panafricain, à ces sorties, a déjà programmé d'autres manifestations dans d'autres capitales européennes, comme Paris ou Bruxelles et a prévu de marcher sur toute l'étendue du territoire national les 7, 8 et 9 novembre prochains avec les mêmes réclamations à savoir le retour à la Constitution de 1992, le vote de la diaspora, la révision du cadre électoral et la libération des personnes arrêtées depuis le début des manifestations le 19 août 2017. Sur ce dernier point, le régime a été plus attentif. Dans la journée d'hier, 48 détenus ont été libérés et sont rentrés chez eux. Par contre des activistes des droits humains font état d'autres arrestations « illégales » qui se poursuivraient et des manœuvres d'intimidation de la part des éléments du pouvoir à Lomé.

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