Mali : vers un retour de la paix avec les patrouilles mixtes ?

Mises en place ce jeudi 23 février lors d'une cérémonie en grandes pompes, c'est ce week-end que les patrouilles mixtes vont se lancer dans leur mission de sécurisation du Nord-Mali. Une aubaine pour cette région d'où est partie la menace djihadiste. Pour la contrer, ces patrouilles que l'on dit sous équipées, vont-elles ramener la paix après 5 ans d'une guerre qui aura disloquée le Mali ? La question se pose avec acuité.
Ibrahima Bayo Jr.

Jean-Yves le Drian, le ministre français de la Défense, y voit le « bon chemin » vers un retour de la paix au Mali. Longtemps reportées, le plus souvent mal équipées, à vrai dire difficile à mettre en place, les patrouilles mixtes, composées de soldats maliens et de combattants de la Plateforme et de la Coordination des mouvements de l'Azawad (CMA), ont été lancées ce 23 février à Gao, plus grande ville du nord du Mali.

Patrouilles mixtes sous équipées face au terrorisme et à l'insécurité

Pour le symbole, la cérémonie de lancement s'est déroulée au camp de regroupement de ces mouvements, siège du Mécanisme opérationnel de coordination (MOC). Cinq semaines auparavant, le 18 janvier dernier, ce même camp a été le théâtre sanglant d'une attaque à la voiture piégée qui fait 54 morts. Mais cet épisode n'a pas freiné le processus qui devrait diriger le Mali vers la paix.

La mise en place des patrouilles, résultat de l'accord signé en juin dernier par le gouvernement, la Plateforme et le CMA, devrait permettre de sécuriser le nord du Mali. C'est de cette partie du pays qu'est partie la fièvre djihadiste qui s'est emparée du pays à la suite du renversement en 2012 d'Amadou Toumani Touré, accusé de ne pas être assez ferme face à face à la partition du pays et à la prolifération des groupes terroristes couplée à des revendications de rebelles.

Les premières patrouilles mixtes, composées pour l'heure de 600 hommes dont 200 pour chacun des trois signataires de l'accord, vont entamer leur mission à Gao dès ce samedi 25 février 2017, avant d'être déployées dans tout le nord du Mali. L'enjeu est de taille. Il s'agit de redonner un semblant de sécurité à une population qui subit presqu'au quotidien, les attaques djihadistes et l'insécurité prégnante que dénoncent les ONG et organismes internationaux.

L'intervention militaire française qui a installé la force Barkhane en remplacement de Serval et d'Epervier, a appuyé les autorités maliennes pour chasser une partie des djihadistes du nord. Même avec l'appui de leurs alliés, les autorités maliennes ne contrôlent pas l'étendue des 1,2 million de kilomètres carrés du pays.

Dans la situation où les patrouilles mixtes s'élancent, le nord et le centre du Mali sont confrontés aux violences des groupes rebelles armés et des groupes terroristes. Plus au sud, Bamako, la capitale malienne qui semblait sécurisée, est de plus en plus sous pression de mouvements sévissant dans la région du Sahel.

La paix face à plusieurs écueils

Pour ne rien arranger, Jean-Yves le Drian a fait escale à Bamako pour rencontrer le président malien Ibrahim Boubacar Keïta dans le cadre de sa tournée sahélienne. Au sortir de son tête-à-tête, le ministre de la Défense a indiqué que « la France souhaite que les Maliens s'organisent entre eux ».

Pourtant, même si le ministre de la Défense assure au président le soutien français, la France semble vouloir "se laver les mains" d'un bourbier malien duquel elle tente de se sortir depuis son intervention. Pourtant, les patrouilles mixtes, annoncées comme le premier pas vers la paix, semblent sous-équipées face à la menace terroriste qu'elles vont combattre. Dans une conjoncture difficile, le gouvernement malien n'a pu assurer que les véhicules de transport des patrouilles, les tenues et des armes légères, ce qui déséquilibre dès le départ le rapport de forces avec la menace qu'elles combattent.

L'enveloppe de 316 milliards Fcfa (481 millions d'euros) annoncée par le gouvernement malien pour le renforcement des secteurs de la défense et de la sécurité en 2017, sera affectée à l'achat de matériel de l'armée dans le cadre de la loi d'orientation et de programmation militaire (LOPM). La Minusma et la force Barkhane n'envisagent pas de mettre leur enveloppe à la participation de l'«effort de guerre » contre le terrorisme. Pour ces derniers, cet équipement est à la charge de la Défense malienne dont dépendent les patrouilles.

Autre écueil, l'installation des autorités intérimaires. Dans le cadre de l'accord de juin 2015, le gouvernement malien avait prévu la nomination d'autorités administratives intérimaires dans des régions maliennes du nord en attendant le choix de la population - pour la plupart des déplacés fuyant la situation au nord- via un processus électoral difficilement applicable dans des parties non contrôlées par l'Etat central. Seulement, l'installation de ces autorités qui devait intervenir le 18 janvier, a été remise à plus tard.

La mise sur pied d'une armée refondue pour faire face aux défis sécuritaires et de défense, constitue ici l'un des plus grands efforts pour les autorités maliennes. Une armée bien formée, mieux équipée pour contre le terrorisme et l'insécurité, les plus grands obstacles à la paix dans la région.

Ibrahima Bayo Jr.

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