Science et Technologie : le Kenya améliore sa position avec beaucoup d'ambition et peu de moyens...

Le Kenya est sans doute l'un des exemples à suivre sur le continent. Privé de ressources naturelles (outre peu être le bois), le pays a décidé à partir de 2012 de faire de la recherche et de l'innovation un moteur pour doper son économie. Une ambition qu'il cherche à assouvir en dédiant à l'investissement en innovation et en science 2 % de son PIB (55,24 milliards de dollars en 2013) .
Mehdi Lahdidi
(Crédits : DR)

Sur le papier, le Kenya devrait être une des premières puissance scientifique et technologique. Or, malgré que les pouvoirs publics multiplient les annonces (3, depuis 2012, par l'ex-Chef d'Etat Mwai Kibaki), les avancées se font limitées. En effet, il est pratiquement surprenant que la 8ème puissance économique continentale, nouvelle plaque tournante de l'Afrique centrale et de l'Afrique de l'est, dont l'influence au sein du continent grandit du jour en jour, n'occupe que la 17ème place dans le classement du « Rapport sur les Capacités en Afrique 2017 », établi par le The African Capacity Building foundation.

Il s'agit quand même d'un pays où la prise en compte et l'intégration des sciences, technologie et innovation (STI), comme moteur ultime de la croissance, est cité dans presque tous les plans et programmes nationaux de développement. D'ailleurs, elles sont identifiées dans Vision 2030, le programme de développement phare du pays couvrant la période de 2008 à 2030 et qui vise à transformer le Kenya en un pays « nouvellement industrialisé, à revenu moyen (revenu supérieur à la moyenne mondiale actuellement à 10.000 dollars), comme un pilier fondamental. Avec un taux d'alphabétisation des adultes qui ne dépasse les 72.2 % (chiffres unicef 2012), le Kenya a enregistré le plus grand nombre de publications scientifiques (1.374) et le pourcentage le plus élevé (11,3 %) d'articles les plus cités en 2008-12 dans les pays l'Afrique de l'Est. Il occupe également 8ème place au niveau de l'Afrique en terme de nombre de chercheurs par habitant avec 318 pour chaque million d'habitants. Le pays comptait en 2013, 44,35 millions de citoyens.

Cette performance, le pays la doit à ses dépenses en matière de R&D qui sont considérées parmi les plus élevées avec 0,79 % du produit intérieur brut (PIB) en 2010. Un chiffre devait atteindre le seuil symbolique de deux points du PIB, cette année, avec l'opérationnalisation du Fonds National de la Recherche. L'organisme a été institué en en janvier 2013 dans le cadre de la Loi sur la science, la technologie et l'innovation promulgué en 2012. Il s'agit du principal texte de loi visant à faciliter la promotion, la coordination et la réglementation pour accompagner les avancées de la science, de la technologie et de l'innovation dans le pays. Il vise également à accorder la priorité au développement de la science, de la technologie et de l'innovation et à renforcer leur rôle dans le système national de production. La loi insiste et réglemente les partenariats publics privés en matière de recherche scientifique et d'innovation.

Ascension rapide

Si le Kenya fait une ascension rapide, c'est aussi grâce au précieux soutien financier que lui procurent ses alliés britanniques et américains. Par exemple, les sources extérieures sont à l'origine du 47 % du financement l'ancienne version du Fonds national de la recherche sur la période 2008-2010. Le principal de ces ressources vont alimenter les projets de recherches dans les universités et les principales institutions de recherches dans le pays. Pour 2016 par exemple, le fonds réserve 20 millions de shilling kenyan (soit près de 181.000 euros), en plus du soutien du Newton Fund, un fonds d'investissement étatique de l'Angleterre et qui est doté d'un budget de 700 millions de livres anglaises à investir dans la recherche dans les pays en développement d'ici 2021.

Cet argent ira nourrir les recherches dans des thématiques spécifiques, à savoir la sécurité alimentaire, les énergies durable et renouvelables, la santé, l'environnement et le changement climatique, les compétences en transition économique et création d'emplois (projets innovants de PME) et les problèmes transversaux.

Le Fonds n'est pas le seul outil mis à la disposition de la recherche. Le Kenya dispose d'un des systèmes d'innovation les plus développés avec une agence bien implantée qui est le Kenya Innovation Agency (Agence kényane de l'innovation). Son rôle est d'institutionnaliser les rapports entre les parties prenantes, notamment, les universités, les instituts de recherche, le secteur privé et le gouvernement. Elle est également chargée de créer les parcs scientifiques et de l'innovation; favoriser la culture de l'innovation ; veiller sur les normes et les bases de données ; et assure la diffusion des connaissances scientifiques.

Les freins à la recherche

La loi de 2013 fonde également toutes une galaxie d'instituts de recherches dans des domaines bien précis et qui eux aussi bénéficient du soutien de Fonds National de la Recherche et ses partenaires dont les plus généreux sont britannique et américain. Parmi ces institut, l'on peut cité l'Institut des Nanotechnologies du Kenya, le Laboratoire national de recherche en sciences physiques pour l'ingénierie et les nouvelles technologies de production, Centre de recherche nucléaire pour les applications pacifiques, l'Institut kenyan de pétrole et de gaz et l'Institut kenyan d'exploitation minière et de géologie...Pour le moment, selon des évaluations réalisées par les missions européennes que La Tribune Afrique a pu consulté, une bonne partie de ces instituts fonctionnent à vitesse réduite pour deux principales raisons : le manque de moyens financiers et techniques et la rareté des ressources humaines kényanes capables de les guider...

Ces freins à l'avancée des STI dans le pays ne sont pas nouveaux. Un diagnostic de la commission qui a rédigé la Loi sur la science, la technologie et l'innovation avait révélé les sources du déficit en innovation. Des facteurs que le pays partage avec beaucoup de ses voisins continentaux. Il s'agit de système d'innovation non coordonné et fragmenté où les synergies et le réseautage entre les institutions gouvernementales, de recherche et de formation, l'industrie, le secteur financier et les groupes professionnels sont faibles, le manque d'une politique, d'un ordre du jour et de priorités de recherche nationaux harmonisées, un financement inadéquat pour la recherche, l'absence d'un inventaire des compétences, un alignement inadéquat de la planification des ressources humaines aux besoins de développement, faible état des infrastructures et de l'équipement pour la recherche dans l'enseignement supérieur et la formation et une faible culture scientifique parmi la population...Tous des questions auxquelles le Kenya tente de trouver des réponses adéquates, sans pour autant se donner les moyens de leurs ambitions... Notons aussi que le pays a traversé les quatre dernières années une difficile conjoncture économique qui a lourdement impacté ses capacités budgétaires.

Mehdi Lahdidi

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Commentaire 1
à écrit le 07/02/2019 à 13:04
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je suis une bachelière et je souhaite étudié la chimie nucléaire au Kenya

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