Cameroun/Bolloré  : Cyrille à l'épreuve du déraillement

Il lui aura fallu attendre moins de 10 mois pour que la première épreuve d'envergure survienne. Nommé en janvier dernier patron de Bolloré Transports & Logistics, la mégastructure qui regroupe désormais les activités énergie, logistique, portuaire et ferroviaire du groupe, Cyrille Bolloré, tout juste trente ans, se retrouve confronté à sa première crise majeure avec le déraillement d'un train au Cameroun qui a fait officiellement 75 morts et des centaines de blessés.
Cyrille Bolloré est à la tête de Bolloré Transports & Logistics, la mégastructure qui regroupe désormais les activités énergie, logistique, portuaire et ferroviaire du groupe.

Ce dimanche, le ministre des transports du Cameroun a directement mis en cause l'opérateur ferroviaire, Camrail, affirmant que la décision de rallonger les rames - probablement à l'origine du sinistre-  avait été prise par cette filiale du groupe Bolloré. Interview du Ministre des Transports du Cameroun

 En banlieue parisienne, du côté du quai de Dion-Bouton à Puteaux où se trouve le siège de Bolloré, aucun commentaire n'a encore filtré et aucun communiqué n'a été émis, même si les réunions de crise s'enchaînent, selon les informations qu'a pu obtenir La Tribune Afrique. A la manoeuvre, Cyrille Bolloré serait en liaison directe avec le management de Camrail au Cameroun et serait informé « en temps réel » des évolutions  de la situation sur le terrain. Ainsi, selon cette source proche de la direction du groupe, avec laquelle La Tribune Afrique a pu s'entretenir  « Le fait que le groupe n'aie pas encore émis de position officielle relative à la catastrophe ferroviaire n'est pas surprenant en soi, cela correspond à la tradition de prudence de Bolloré. Cyrille, en liaison directe avec son père, Vincent, veut attendre d'avoir le maximum d'éléments avant de communiquer, quitte à ce que les esprits s'échauffent un peu ».

Prudence de sioux donc du côté de Bolloré où l'on préfère laisser la filiale camerounaise en première ligne. Les Spins Doctors du groupe, qui avaient orchestré une communication millimétrée au printemps dernier lors de l'adoubement de Cyrille estiment donc qu'il est « urgent d'attendre ». Chez Bolloré, l'on sait qu'une communication trop hâtive en Afrique risquerait de générer des effets pervers qui pourraient avoir un effet domino sur l'image du groupe dans l'ensemble de la sous-région.

 Enjeux énormes pour l'héritier Bolloré

 Les enjeux pour le jeune patron de Bolloré Transports & Logistics sont donc conséquents. Avant de nommer son fils à la tête de cette activité, Vincent Bolloré avait du se séparer, en 2014, de Dominique Lafont, l'un des « africanistes » historiques du groupe, qui avait effectué l'essentiel de sa carrière au sein de l'entreprise. Lafont a depuis rejoint le fonds d'investissement américain KKR en tant que Senior Advisor après un bref passage au BCG.

Cyrille Bolloré doit donc faire la démonstration de la justesse du choix de son père, et s'affranchir à la faveur de cette crise camerounaise de l'étiquette d'héritier qui lui colle inévitablement à la peau. Toutefois, il doit d'abord faire face à un paradoxe : bien que réputé talentueux, il ne dispose pas de la proximité dont jouit son père avec les principaux donneurs d'ordre camerounais, et notamment la présidence. Or, s'il venait à lui demander d'intervenir, il se fragiliserait aussitôt auprès de ses troupes.

Dans cette configuration, il sera dans l'obligation de « monter au front » à un moment où à un autre, d'autant plus qu'au Cameroun, plus qu'ailleurs, l'on attache énormément d'importance aux symboles, et que le pays semble gagné par une fièvre complotiste de grande ampleur depuis la catastrophe. Ce dimanche, les réseaux sociaux ainsi que les médias bruissaient de mille rumeurs autour de la catastrophe, contribuant à mettre le pays encore plus sous tension.

Un pays en ébullition

 L'ébullition est telle que le Président Paul Biya a écourté un long séjour à l'étranger- vraisemblablement en Suisse- pour rentrer au pays ce dimanche. A Yaoundé, la situation est donc jugée suffisamment grave pour que celui que l'on surnomme le « Sphinx », connu pour la gestion parcimonieuse de son temps et de ses apparitions, soit contraint de rentrer précipitamment, voire d'adresser un discours à la nation.

 Il faut dire que le Président lui-même a été fragilisé ces derniers mois, avec la sortie il y a quelques jours d'un « mémorandum » contre sa personne qui a fait l'objet de débats intenses au sein du pays. Dans ce cadre, Biya pourrait bien être tenté d'exploiter la catastrophe ferroviaire en mettant à l'index le groupe Bolloré afin de redorer son blason interne, ce qui augmente d'autant la pression sur les épaules de Cyrille Bolloré. Si l'adage Cornélien voulant qu' « aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années » venait à se vérifier pour lui lors de la gestion de cette crise camerounaise, Cyrille Bolloré aura beaucoup gagné. Mais surtout, il se sera fait un prénom...

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Commentaires 9
à écrit le 26/10/2016 à 20:19
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Au moment o! les familles pleurent leurs corps, il vaut mieux nous épargner le sempiternel problème camerounais de "nombre de morts". Pour moi il n'y a pas de différence entre 75 morts et 600 morts comme le voudraient certains citoyens en mal de sen...

à écrit le 26/10/2016 à 13:57
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Les africains vont cesser de toujour vouloir cacher la verité.pourquoi parler de75 mort alors qu'on a eu une centaine?alors cela ne nous avance en rien.aussi que nos chefs d'état cessent de ridiculiser les afriquant compatissantavec les predateurs d'...

à écrit le 26/10/2016 à 10:26
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Bien que tragique;l'Etat en principe et Bollore d'autre part se doivent de donner aux camerounais une explication qui tienne la route... C'est trop éprovant mais qu'à cela ne tienne le nombre approximatif de morts devraient faire la une car c'est un...

à écrit le 25/10/2016 à 13:09
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C'est un feu facile à éteindre. Il suffit d'annoncer que Bolloré déclenche le système d'indemnisation des victimes. Et au moment de publier le manifeste des passagers du 'Train de la Mort', le vrai "chiffre officiel" des victimes sortira de quelque p...

à écrit le 24/10/2016 à 17:07
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[23/10 21:10] Aurelie Minelie: J'arrive pas a m'endormir [23/10 21:18] Aurelie Minelie: Oui qd même [23/10 21:18] Aurelie Minelie: Mais j'ai bcp pleuré [23/10 21:18] Aurelie Minelie: Ma voisine d lit vien TT juste d mourir [23/10 21:19] Aurelie ...

à écrit le 24/10/2016 à 15:46
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Vérifier le nombre de morts s'il vous plaît

à écrit le 24/10/2016 à 15:28
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Vous parlez de 75 morts vous insulté les familles des victimes pauvre Cameroun

à écrit le 24/10/2016 à 15:21
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Je suis déçu q les images d'individus broyés par le train de Bolloré ne suffisent pas à lui faire prendre congé un instant du sauvage capitalisme qui le caractérise. Il est donc plus question ici d'un combat d'éléphants l'un autant puissant que l'aut...

à écrit le 24/10/2016 à 9:10
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Je suis Camerounaise et touche directement par un deces de cet accident. Je suis aussi d'accord qu'il est urgent pour Bollore de ne pas agir precipitament

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