Interview : « L'avenir est assuré pour le digital en Afrique »

La transformation numérique de l’Afrique est déjà mainstream. Le président de l’association des annonceurs nigérians, et membre du conseil d’administration de la fédération mondiale des annonceurs, David Okeme en est sûr. Pour ce spécialiste qui a passé 17 de ces 24 ans de carrière à Unilever, ce n’est pas une question de choix. Les entreprises sont obligées d’adopter des stratégies digitales et d’investir dans les outils nécessaires pour assurer leur croissance. Interview.
Mehdi Lahdidi

La Tribune Afrique : Comment évaluez-vous le rythme de croissance de la transformation digitale de l'Afrique ?

David Okeme : La réalité de l'Afrique, c'est que 50% du milliard de personnes vivant en Afrique sont en dessous de l'âge de 20 ans. Ainsi, l'âge médian par exemple au Nigeria est de 18 ans. Or, 18 ans c'est justement l'âge des personnes qui sont nées au cours de l'ère numérique. Et en raison de leurs habitudes, de leurs pratiques, ils sont le seul facteur à l'origine des changements dans le marketing en Afrique aujourd'hui. La transformation numérique au Nigeria progresse à un rythme très rapide. C'est vrai que cela a commencé avec des sociétés multinationales comme Unilever et Procter & Gamble, mais maintenant cela va devenir courant. Aujourd'hui, plus de 15% du budget de la publicité va dans le marketing numérique. La plupart des entreprises sont passées des stratégies marketing traditionnelles à d'autres qui privilégient le mobile. Chaque organisation au Nigeria dispose d'une stratégie globalement basée sur le mobile, propulsant sa transformation numérique. Donc, l'adoption des nouvelles technologies est extrêmement élevée. Nous avons même de grandes entreprises nigérianes, comme Nigerian Breweries, qui fonctionnent déjà à un niveau élevé de meilleures pratiques. Ils ont un centre d'écoute sociale (social listening center, centre d'écoute des réseaux sociaux) où ils ont investi dans des outils numériques pour surveiller les millions d'interactions et de discussions se déroulant sur un marché cible spécifique et dans des domaines particuliers. Et ils utilisent les résultats de ces centres pour piloter les innovations et les activations, et leur communication. Donc, d'un point de vue de l'investissement, je pense que cela devient déjà mainstream.

Ces ambitions ne se heurtent-elles pas à un défi de modernisation des infrastructures ?

L'un des plus grands défis est que nous avons encore beaucoup d'appareils analogiques. Par exemple au Nigeria, la plupart des réseaux de télévision, sont toujours en cours d'exécution sur les systèmes analogiques. En juin 2017, toute la transmission TV passera au numérique. Nous voyons cela comme un stimulant majeur de l'accélération numérique en Afrique. Mais cette accélération viendra avec ses défis. Il ne s'agit pas d'un interrupteur qu'on allume et qu'on éteint. La gestion de la chaîne nécessite de la formation et beaucoup d'investissement. En plus, je ne suis pas sûr que nous avons fait une évaluation appropriée des risques. Mais au-delà, je pense que l'avenir de la transformation numérique au Nigeria est brillant parce que nous n'avons pas le choix ! C'est là où se trouvent les consommateurs. C'est ce que les consommateurs utilisent. Si vous voulez vous engager et parler avec eux, vous devez vraiment le faire numériquement.

 Qu'en est-il des autres pays de la région ?

L'Afrique du Sud dispose de l'infrastructure numérique la plus robuste. Mais le Kenya a un réseau de 3éme génération. Le Nigeria aussi, mais le réseau 4g est en cours de déploiement. Donc, je pense qu'en matière d'infrastructures, beaucoup de progrès sont en cours dans la région. Je pense que le plus grand défi sera la téléphonie mobile et la pénétration des smartphones.  Il y a encore 70% du parc mobile qui est constitué des appareils téléphoniques « normaux ». Les entreprises s'adaptent à cette donne. La plupart d'entre eux ont commencé à mettre en place des sites mobiles ou des sites qui sont compatibles avec ce genre d'appareil. Mais comme les prix des smartphones sont en baisse, cette tendance changera. Et encore une fois, si vous regardez des pays comme le Kenya où les nouveaux systèmes de paiement mobiles ont révolutionné l'ensemble des infrastructures de paiement dans le pays, avec des répercutions sur l'inclusion financière, vous comprendrez rapidement que c'est un facteur qui accélérera de la transformation numérique partout sur le continent. Donc l'avenir est assuré pour le numérique.

 A votre avis quelles sont vos prédictions pour l'année prochaine en terme de développement des TIC ?

2018 sera l'année représentera un point de basculement pour le mobile en Afrique. C'est l'année où la pénétration mobile va atteindre une étape critique. Cela fait que les organisations qui veulent être vraiment efficaces dans leur communication en 2018 devront commencer à investir en 2017. Il y aura énormément d'investissements dans la création de solutions mobiles, de campagnes mobiles, etc, en 2017. Donc une chose est sûre, l'année prochaine sera une année très chargée pour mobile.

L'Interview, en vidéo, sera publiée demain, lundi, sur la Tribune Afrique !

Mehdi Lahdidi

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